La vedette fait rugir ses moteurs, la camĂ©ra thermique scrute la mer et la nuit dans le dĂ©troit de Gibraltar oĂč prospĂšrent les trafics, la police espagnole traque le haschich qui arrive du Maroc en Ă©normes minuit, les camĂ©ras et les radars qui surveillent la cĂŽte dĂ©tectent une embarcation suspecte. Le centre de contrĂŽle informe la Guardia civil au port d'Algesiras, Ă l'extrĂȘme sud de l'Espagne."Ils cherchent sĂ»rement un endroit oĂč dĂ©barquer la marchandise", dit Jesus, un des policiers de garde qui tient Ă protĂ©ger son anonymat. Ils sont trois Ă sauter Ă bord d'une vedette dotĂ©e de deux puissants moteurs de 300 chevaux, avant d'allumer une camĂ©ra le pilote, conduit debout, tendu, une main sur le gouvernail, l'autre sur le levier d'accĂ©lĂ©ration. Entre les lumiĂšres du port d'Algesiras et celles de l'enclave britannique de Gibraltar, le bateau vole Ă la surface de l'eau, laissant un Ă©pais sillage d'Ă©cume."Braque le projecteur lĂ -bas", crie Jesus quand soudain ils localisent un canot pneumatique sans deux occupants, vĂȘtus de combinaisons de flottaison, ne rĂ©sistent pas. Mais Ă bord, les agents ont beau balayer la surface de l'eau de leur projecteur, ils ne trouveront rien. La cargaison a probablement Ă©tĂ© jetĂ© Ă l'eau. Cette fois, c'Ă©tait sans doute du tabac de les deux suspects et leur embarcation, la vedette rentre au parfois, les opĂ©rations se rĂ©vĂšlent plus violentes, et mĂȘme passer le haschich produit dans la chaĂźne du Rif nord du Maroc, les trafiquants utilisent des embarcations pneumatiques de 8 Ă 12 mĂštres de longueur, qui comptent jusqu'Ă cinq moteurs et sont capables d'atteindre les 60 noeuds plus de 110 km/h.Leurs grandes organisations emploient une cinquantaine de personnes -pilotes, porteurs, chauffeurs, guetteurs- pour dĂ©barquer des cargaisons d'une ou deux tonnes, en ballots de 30 kg, explique Ă l'AFP le lieutenant Pablo Cobo, chef de l'Ă©quipe chargĂ©e de la dĂ©linquance organisĂ©e et de la lutte antidrogue. Chaque kilo se revendra euros dans la rue, Poursuites mortelles -La police emploie aussi des hĂ©licoptĂšres pour "mieux poursuivre les embarcations et Ă©clairer la zone", dit M. appareils, Ă©quipĂ©s de flotteurs pour le cas oĂč ils toucheraient l'eau, volent au ras des vagues pour obliger, par le souffle des pales, la vedette en fuite Ă changer de 9 aoĂ»t, une course-poursuite de ce type s'est achevĂ©e sur une plage de Gibraltar, suscitant des protestations de Londres contre l'entrĂ©e d'agents espagnols dans l'enclave disputĂ©e."Ce sont des situations Ă risque, du fait de la vitesse, d'une mer mauvaise, des manoeuvres des trafiquants qui tentent d'Ă©peronner notre bateau", dit Antonio, un autre garde civil. Depuis peu, ils ont mĂȘme appris Ă faire dĂ©coller leur bateau pour qu'il s'Ă©crase sur celui des arrive qu'ils lancent des objets contre le rotor de l'hĂ©licoptĂšre. Cela a causĂ© la chute d'un appareil et la mort d'un agent il y a quelques annĂ©es, rappelle JesĂșs. Des pilotes employĂ©s par les "narcos" ont aussi trouvĂ© la mort en mer, des jeunes hommes de 20 Ă 30 ans attirĂ©s par une paie de plusieurs milliers d'euros dans une zone Ă 40% de taux de chĂŽmage, un rapport de l'Observatoire europĂ©en des drogues et des toxicomanies, "au cours des derniĂšres dĂ©cennies, le Maroc est devenu le premier producteur et exportateur mondial de rĂ©sine de cannabis, ou haschich".La majeure partie de sa production passe en Europe, par le dĂ©troit de Gibraltar et le reste dĂ©barque sur les cĂŽtes 2013, l'Andalousie a saisi 262 des 319 tonnes de haschich confisquĂ©es en Espagne. Et en 2012, 73,7% des saisies de haschich en Europe avaient Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©es en Espagne, selon le ministĂšre de l' au chat et Ă la souris avec les policiers, les trafiquants surveillent les mouvements des patrouilles, s'aventurent sur des voies non navigables, et parfois, font sortir en mer des vedettes "leurres" sans aucune marchandise Ă Ă©tĂ©, profitant des bonnes conditions maritimes, ils utilisent aussi des scooters des mers, plus difficiles Ă dĂ©tecter. Quitte Ă emmener par la mĂȘme occasion des passagers clandestins."Une moto peut transporter quatre ballots de cannabis et deux migrants", explique Jesus. "Quand ils arrivent Ă terre, ce sont eux qui se chargent d'emmener la marchandise Ă l'acheteur, pour payer ainsi leur passage".
Lelong des cĂŽtes mĂ©diterranĂ©ennes et atlantiques, lâespace maritime marocain connaĂźt une intense activitĂ©. «Plusieurs milliers de types de navires passent par les eaux marocaines (300 navires/jour au niveau du dĂ©troit de Gibraltar), soit pour se rendre Ă lâun des ports marocains, soit pour prendre une route maritime vers dâautres destinations», a soulignĂ©
Localisation du dĂ©troit de Gibraltar Le dĂ©troit de Gibraltar est un bras de mer sĂ©parant l'Europe au nord de l'Afrique au sud. Il est situĂ© entre l'Espagne et le Maroc. Il permet le passage maritime entre l'ocĂ©an Atlantique et la mer MĂ©diterranĂ©e Ă laquelle il appartient. Ses limites occidentales sont le cap Spartel Maroc et le cap Trafalgar Espagne. Ses extrĂ©mitĂ©s orientales sont du cĂŽtĂ© africain la punta Almina Ceuta, Espagne et cĂŽtĂ© europĂ©en la punta de Europa Gibraltar. C'est un des lieux les plus frĂ©quentĂ©s par les navires dans le monde. Dans l'AntiquitĂ©, le dĂ©troit Ă©tait appelĂ© Colonnes d'Hercule. Sommaire 1 GĂ©ographie du dĂ©troit de Gibraltar 2 L'utilisation du dĂ©troit de Gibraltar 3 Projet de tunnel 4 Sources, liens 5 Pour complĂ©ter sur les dĂ©troits GĂ©ographie du dĂ©troit de Gibraltar[modifier modifier le wikicode] Le dĂ©troit de Gibraltar a une largeur minimum de 14,4 km. Sa profondeur moyenne est de 300 m, mais elle atteint 900 m dans la partie la plus Ă©troite. Deux ports importants se trouvent sur ce dĂ©troit AlgĂ©siras Espagne, premier port mĂ©diterranĂ©en, et Tanger, sur la rive marocaine. Le dĂ©troit est placĂ© Ă la limite des plaques tectoniques europĂ©enne et africaine. Les plaques se rapprochent d'un centimĂštre par an. Les sĂ©ismes sont frĂ©quents. On constate un courant dans les eaux de surface. Celui-ci va de l'ocĂ©an Atlantique, oĂč les eaux sont plus lĂ©gĂšres, vers la mer MĂ©diterranĂ©e, oĂč les eaux sont plus lourdes du fait de la forte salinitĂ© due Ă l'Ă©vaporation importante et Ă un apport insuffisant d'eaux continentales. La limite entre les eaux atlantiques et mĂ©diterranĂ©ennes se fait Ă l'est du dĂ©troit. Le dĂ©troit de Gibraltar. Photo panoramique prise depuis la cĂŽte espagnole, Ă Tarifa. Dans le fond, la cĂŽte marocaine. L'utilisation du dĂ©troit de Gibraltar[modifier modifier le wikicode] Les eaux du dĂ©troit sont partagĂ©es entre l'Espagne, le Royaume-Uni qui possĂšde Gibraltar depuis 1704 et le Maroc. Cependant un accord fait du dĂ©troit une voie internationale pour la navigation. PrĂšs de 100 000 navires par an circulant de la MĂ©diterranĂ©e Ă l'Atlantique empruntent le dĂ©troit prĂšs de 300 par jour. C'est un des lieux maritimes les plus frĂ©quentĂ©s du monde. Pour faciliter la circulation maritime, il existe un dispositif de sĂ©paration du trafic. Le dĂ©troit a aussi des liaisons nord-sud par ferry-boats passagers et trafic automobile. C'est un des points importants de l'immigration clandestine de l'Afrique vers l'Europe, le plus souvent Ă partir de l'enclave espagnole de Ceuta, situĂ©e au nord-est du Maroc. Projet de tunnel[modifier modifier le wikicode] Profil du dĂ©troit de Gibraltar entre l'Andalousie Espagne, Ă gauche, et le Rif Maroc, Ă droite. Image de synthĂšse. Depuis les accords entre l'Espagne et le Maroc en 1980 et 1989, un projet de tunnel ferroviaire sous le dĂ©troit travaux exploratoires se sont achevĂ©s en 2008. Mais la rentabilitĂ© d'un tel tunnel identique Ă celui sous la Manche est mise en doute, d'autant que le coĂ»t des travaux est extrĂȘmement Ă©levĂ© et difficile Ă financer par le Maroc. Il en est de mĂȘme pour son utilitĂ© on peut augmenter le trafic des ports de Tanger et d'AlgĂ©siras. Le risque sismique Ă©tant prĂ©sent, la construction et la sĂ©curitĂ© posent aussi des problĂšmes. Dans sa derniĂšre version 2010, le projet prĂ©voit un tunnel de 42 km, dont 27 km sous la mer, reliant Tanger Ă Tarifa. Le tunnel serait assez semblable au tunnel sous la Manche deux tubes de circulation ferroviaire et un tube de service, mais il devrait descendre bien plus profondĂ©ment, Ă 400 m au-dessous du niveau de la mer1. Sources, liens[modifier modifier le wikicode] â CaractĂ©ristiques du tunnel, site du gouvernement marocain WikipĂ©dia wpDĂ©troit de Gibraltar wpTunnel de Gibraltar Pour complĂ©ter sur les dĂ©troits[modifier modifier le wikicode] DĂ©troit du pas de Calais DĂ©troit de Malacca DĂ©troit de Bering DĂ©troit d'Ormuz
Gibraltarest un territoire britannique d'outre-mer [3], situĂ© au sud de la pĂ©ninsule IbĂ©rique, en bordure du dĂ©troit de Gibraltar, qui relie la MĂ©diterranĂ©e Ă l'ocĂ©an Atlantique.Il correspond au rocher de Gibraltar et Ă ses environs immĂ©diats et est sĂ©parĂ© de l'Espagne par une frontiĂšre de 1,2 kilomĂštre.. Gibraltar est possession du Royaume-Uni (initialement, une possession de l Plus de navires ont traversĂ© le dĂ©troit de Gibraltar en 2014. Soit plus de 250 chaque jour ou plus de 10 Ă chaque heure. La zone du dĂ©troit de Gibraltar devient incontournable en termes de commerce et dâĂ©changes internationaux. Dans une rĂ©gion sensible. Le port de Tanger-Med et la Tanger Free Zone modifient le visage de la rĂ©gion de Tanger. A lâest du dĂ©troit de Gibraltar, Ă Sebta, territoire occupĂ© par lâEspagne, Madrid permet quotidiennement Ă plus de porteurs marocains de gagner leur vie en exfiltrant» des produits de consommation vers Fnideq, TĂ©touan et la plate-forme» de Ksar el KĂ©bir Ă 150 km plus au sud. Juste au nord, AlgĂ©siras est le premier port espagnol et premier port de la MĂ©diterranĂ©e. Câest lĂ que se trouve aussi la plus importante raffinerie espagnole de produits pĂ©troliers. Juste Ă cĂŽtĂ© se trouve une base de sous-marins nuclĂ©aires. navires de marchandises par an, traversĂ©es du dĂ©troit et une concentration de marines militaires Ainsi du conflit Ă©ternel» entre lâEspagne et Gibraltar. Madrid ne reconnaĂźt pas la souverainetĂ© britannique sur le Rocher, comme Rabat pour Sebta et MĂ©lillia. Mais Gibraltar, grĂące au ⊠trafic de cigarettes et dâalcools, vit et fait vivre les habitants de La LinĂ©a, de San Roque et une partie de ceux dâAlgĂ©siras. A lâabri des bureaucrates de Londres et de Bruxelles discrets sur le sujet, Gibraltar est une petite place financiĂšre oĂč les gestionnaires de fonds nâont pas de plaques sur les entrĂ©es dâimmeubles. Mais cela nâempĂȘche pas aujourdâhui, que prĂšs de 20% des voitures vendues au Royaume-Uni dâĂȘtre assurĂ©es ⊠à Gibraltar. Au-delĂ des chiffres et des curiositĂ©s rĂ©gionales, Rabat, Madrid et Londres âmais aussi Washington- se soucient de plus en plus des consĂ©quences de la croissance du trafic dans le DĂ©troit et son impact sur les politiques sĂ©curitaires. Les guerres du Moyen-Orient et les menaces terroristes accentuent la tendance. Avec plus de bateaux par an, traversĂ©es de car-ferries et de fast-ferries entre Tanger, Tarifa, Tanger-Med, Sebta, AlgĂ©siras et Gibraltar chaque annĂ©e et des gazoducs qui relient le Maghreb Ă lâEurope du sud, enjeux Ă©conomiques et sĂ©curitaires sont Ă©troitement liĂ©s. Depuis la fin des annĂ©es 1960, les AmĂ©ricains disposent dâune base aĂ©ronavale Ă Rota prĂšs de Cadix. Lâ Navy ne peut rien faire en MĂ©diterranĂ©e ni au Moyen-Orient sans transiter par la rĂ©gion. Si les affaires et les flux financiers sont importants Ă Gibraltar, câest parce que les Anglais comprennent lâimportance de leur prĂ©sence sur le Rocher. En termes de colonies, de commerce et de gĂ©opolitique, les Anglais ne sont pas des amateurs. Câest pourquoi Gibraltar abrite aussi des sous-marins nuclĂ©aires, malgrĂ© lâopposition de Madrid. LâEspagne est la seule puissance prĂ©sente des deux cĂŽtĂ©s du dĂ©troit de Gibraltar. Sur la pĂ©ninsule Ă Tarifa et Ă Malaga, mais aussi Ă Sebta et Ă MĂ©lillia. Câest ce qui rend et qui continuera de rendre les Ă©changes maroco-espagnols sur la dĂ©colonisation toujours compliquĂ©s avec lâEspagne mais Ă©galement avec lâOTAN. Il y a moins de six mois, en novembre 2014, le think tank madrilĂšne Instituto Elcano publiait un rapport remarquĂ© intitulĂ© LâEspagne regarde vers le Sud de la MĂ©diterranĂ©e au Sahel» dans lequel une attention particuliĂšre Ă©tait portĂ©e Ă lâimportance gĂ©oĂ©conomique grandissante» de la rive sud. Une place importante y Ă©tait rĂ©servĂ©e aux thĂšmes de sĂ©curitĂ© et de dĂ©fense, insĂ©parables de la prospĂ©ritĂ© Ă©conomique du Vieux continent. Un conseil de la sĂ©curitĂ© maritime Ă Madrid Depuis lâan passĂ©, Madrid dispose mĂȘme dâun Conseil de la sĂ©curitĂ© maritime qui se rĂ©unit une fois par mois et dont la prĂ©sidence tourne entre les ministĂšres de la DĂ©fense, des Affaires Ă©trangĂšres et de lâIntĂ©rieur. Le Maroc accĂ©lĂšre le pas. Le dĂ©troit de Gibraltar cĂŽtĂ© sud comprend dĂ©sormais deux stations de radars Ă Tanger et du cĂŽtĂ© de Ksar Sghir. Un port militaire doit accueillir ses premiers marins marocains dĂšs cet Ă©tĂ© 2015. Celui-ci est situĂ© Ă quelques miles de Tanger-Med, face aux cĂŽtes de Tarifa et de la baie dâAlgĂ©siras. La prise de conscience de lâimportance commerciale et sĂ©curitaire de la zone nord du Maroc mĂ©diterranĂ©en progresse. Autrement formulĂ©e, elle a fait des pas de gĂ©ant en 10 ans. Outre le lancement dĂ©terminĂ© des infrastructures de Tanger-Med en 2006-2007, lâĂ©tude dâun projet similaire Ă Nador, la construction du port militaire de Ksar Sghir et le souci de dĂ©velopper lâarriĂšre-pays de Fahs-Anjra relĂšvent de la mĂȘme logique. Tanger-Med rĂ©flĂ©chit au sens quâil faut donner Ă lâamplitude que prennent les aspects Ă©conomiques et sĂ©curitaires dans la rĂ©gion», indique une source de TMSA Ă MĂ©dias 24. Le besoin dâune rĂ©flexion approfondie et professionnelle en termes de potentialitĂ©s, de risques, de forces et de faiblesses se pose. Pour lâinstant, si lâinvestissement sur Tanger-Med est lâun des plus importants effectuĂ© au Maroc au cours de ces 10 derniĂšres annĂ©es, la province de Fahs-Anjra demeure paradoxalement lâune des rĂ©gions des plus pauvres et des moins alphabĂ©tisĂ©es du pays. Enjeux marocains Les enjeux sont Ă©normes pour le Maroc. Câest dans cette zone que se recrute aujourdâhui une grande partie des jihadistes marocains et espagnols qui donnent tant de soucis aux services de sĂ©curitĂ© des deux pays. Depuis 40 ans ici, la sagesse» populaire veut que les jeunes de la rĂ©gion aient le choix entre le trafic de drogue, la contrebande ou lâĂ©migration pour sâen sortir». Depuis les guerres dâAfghanistan et dâIrak et Daech, sâest rajoutĂ©e lâoption terrorisme aux trois premiĂšres. Tristes choix. Câest dâici que sâexporte le haschich du Rif dont les revenus, des centaines de millions dâeuros chaque annĂ©e, servent Ă distordre une saine compĂ©tition politique» Ă Tanger, TĂ©touan, Nador ou Al Hoceima notamment, mais pas seulement. Lâargent de la drogue joue un rĂŽle dâamortisseur social important en Ă©tant blanchi dans la contrebande avec Sebta et MĂ©lillia. Les produits de contrebande sont stockĂ©s Ă Fnideq et TĂ©touan avant dâĂȘtre redistribuĂ©s sur le reste du pays. Le circuit de blanchiment est limpide. Câest dâici Ă©galement que partent les pateras de jeunes Subsahariens originaires de pays avec lesquels le Maroc, les entreprises marocaines et la sociĂ©tĂ© civile marocaine souhaitent dĂ©velopper les Ă©changes. Enfin, plus de trois millions de Marocains vivent au nord du dĂ©troit de Gibraltar. Dont prĂšs de en Espagne. Un autre million en France et un autre demi-million en Italie. La ville de Sebta, moins de habitants, est peuplĂ©e Ă moitiĂ© de musulmanĂšs comme aiment dire les rĂ©sidents espagnols de la ville pour dĂ©signer, sans distinction, les Espagnols dâorigine marocaine ou les Marocains y rĂ©sidant lĂ©galement ou non. En rĂ©alitĂ©, la zone du dĂ©troit de Gibraltar, de Tanger Ă Tarifa et de Sebta Ă AlgĂ©siras, se trouve Ă un moment historiquement porteur sur les plans Ă©conomiques et gĂ©ostratĂ©giques. Le Nord du Maroc et le sud de lâEspagne se dĂ©veloppent, les deux rĂ©gions faisant le lien entre deux continents, lâun riche, lâautre au potentiel reconnu. Le moment est Ă saisir pour rĂ©duire lâĂ©conomie de la drogue et favoriser lâentreprenariat, lâĂ©conomie sociale et les initiatives privĂ©es. En 2015 comme en 2050, il y aura toujours 14 km qui sĂ©parent Tarifa de Tanger-Med, et 44 km qui sĂ©parent le cap Spartel tangĂ©rois du cap Trafalgar prĂšs de Cadix. Sur le plan gĂ©ostratĂ©gique, lâimportante commerciale et militaire croissante de la zone du dĂ©troit ne peut que servir son dĂ©veloppement. Câest par lĂ que passent 50% du pĂ©trole et 40% du gaz consommĂ©s en Europe. Plus de 75% des importations europĂ©ennes. Les ports de Tanger-Med et dâAlgĂ©siras sont autant marocains, quâespagnols, africains ou europĂ©ens. Pour les Ă©conomies marocaine et africaine, Tanger-Med joue un rĂŽle chaque annĂ©e plus important. Câest de lĂ que sâexportent les voitures et les piĂšces dĂ©tachĂ©es de Renault et par lĂ que rentrent les intrants des industries textiles et Ă©lectroniques. Plus de camions passent par AlgĂ©siras chaque annĂ©e, du cĂŽtĂ© de Tanger-Med en 2014. De Tanger-Med, Renault a expĂ©diĂ© plus de vĂ©hicules produits en 2014 Ă Melloussa vers ses concessionnaires dâEurope et du Moyen-Orient. La cohĂ©rence du dĂ©veloppement rĂ©gional prend forme. En 2014, Tanger-Med a traitĂ© un peu plus de 3 millions de conteneurs, AlgĂ©siras 4,5 millions. Le port marocain est considĂ©rĂ© comme lâune des infrastructures portuaires les plus connectĂ©es au monde, 16Ăšme sur 100. AlgĂ©siras est le premier port espagnol et mĂ©diterranĂ©en pour les conteneurs. Aujourdâhui, le trafic commercial Ă travers le dĂ©troit de Gibraltar est supĂ©rieur Ă celui du canal de Suez, dâOrmuz face aux cĂŽtes iraniennes ou de Malacca, au sud de la Malaisie. Gibraltar est le deuxiĂšme point de passage au monde aprĂšs le canal franco-britannique de la Manche. Le doublement en cours du canal de Suez Ă©gyptien doit enfin accĂ©lĂ©rer lâimportance Ă©conomique de Tanger-Med et dâAlgĂ©siras. A la fin 2016, la mise en service du terminal Tanger-Med 2 doit porter la capacitĂ© du port marocain Ă 8,5 millions de conteneurs.Lestravaux de construction du port de Nador West Med, situĂ© dans la rĂ©gion marocaine de l'Oriental, devraient s'achever fin 2022. La mise en exploitation, prĂ©vue pour 2024, de la nouvelle locomotive portuaire renforcerait l'ouverture du royaume aux capitaux Ă©trangers et amĂ©liorerait les Ă©changes internationaux ainsi que la connectivitĂ© de la rĂ©gion du Nord-Est
Des policiers espagnols surveillent le dĂ©troit de Gibraltar, prĂšs d'AlgĂ©siras, le 21 aoĂ»t 2015 Guerrero PassĂ© minuit, les camĂ©ras et les radars qui surveillent la cĂŽte dĂ©tectent une embarcation suspecte. Le centre de contrĂŽle informe la Guardia civil au port d'Algesiras, Ă l'extrĂȘme sud de l'Espagne. "Ils cherchent sĂ»rement un endroit oĂč dĂ©barquer la marchandise", dit Jesus, un des policiers de garde qui tient Ă protĂ©ger son anonymat. Ils sont trois Ă sauter Ă bord d'une vedette dotĂ©e de deux puissants moteurs de 300 chevaux, avant d'allumer une camĂ©ra infrarouge. Claudio, le pilote, conduit debout, tendu, une main sur le gouvernail, l'autre sur le levier d'accĂ©lĂ©ration. Offre limitĂ©e. 2 mois pour 1⏠sans engagement Entre les lumiĂšres du port d'Algesiras et celles de l'enclave britannique de Gibraltar, le bateau vole Ă la surface de l'eau, laissant un Ă©pais sillage d'Ă©cume. "Braque le projecteur lĂ -bas", crie Jesus quand soudain ils localisent un canot pneumatique sans lumiĂšre. Ses deux occupants, vĂȘtus de combinaisons de flottaison, ne rĂ©sistent pas. Mais Ă bord, les agents ont beau balayer la surface de l'eau de leur projecteur, ils ne trouveront rien. La cargaison a probablement Ă©tĂ© jetĂ© Ă l'eau. Cette fois, c'Ă©tait sans doute du tabac de contrebande. Emmenant les deux suspects et leur embarcation, la vedette rentre au port. Mais parfois, les opĂ©rations se rĂ©vĂšlent plus violentes, et mĂȘme mortelles. Pour passer le haschich produit dans la chaĂźne du Rif nord du Maroc, les trafiquants utilisent des embarcations pneumatiques de 8 Ă 12 mĂštres de longueur, qui comptent jusqu'Ă cinq moteurs et sont capables d'atteindre les 60 noeuds plus de 110 km/h. Leurs grandes organisations emploient une cinquantaine de personnes -pilotes, porteurs, chauffeurs, guetteurs- pour dĂ©barquer des cargaisons d'une ou deux tonnes, en ballots de 30 kg, explique Ă l'AFP le lieutenant Pablo Cobo, chef de l'Ă©quipe chargĂ©e de la dĂ©linquance organisĂ©e et de la lutte antidrogue. Chaque kilo se revendra euros dans la rue, dit-il. - Poursuites mortelles - La police emploie aussi des hĂ©licoptĂšres pour "mieux poursuivre les embarcations et Ă©clairer la zone", dit M. Cobo. Les appareils, Ă©quipĂ©s de flotteurs pour le cas oĂč ils toucheraient l'eau, volent au ras des vagues pour obliger, par le souffle des pales, la vedette en fuite Ă changer de cap. Le 9 aoĂ»t, une course-poursuite de ce type s'est achevĂ©e sur une plage de Gibraltar, suscitant des protestations de Londres contre l'entrĂ©e d'agents espagnols dans l'enclave disputĂ©e. "Ce sont des situations Ă risque, du fait de la vitesse, d'une mer mauvaise, des manoeuvres des trafiquants qui tentent d'Ă©peronner notre bateau", dit Antonio, un autre garde civil. Depuis peu, ils ont mĂȘme appris Ă faire dĂ©coller leur bateau pour qu'il s'Ă©crase sur celui des policiers. Il arrive qu'ils lancent des objets contre le rotor de l'hĂ©licoptĂšre. Cela a causĂ© la chute d'un appareil et la mort d'un agent il y a quelques annĂ©es, rappelle JesĂșs. Des pilotes employĂ©s par les "narcos" ont aussi trouvĂ© la mort en mer, des jeunes hommes de 20 Ă 30 ans attirĂ©s par une paie de plusieurs milliers d'euros dans une zone Ă 40% de taux de chĂŽmage, dit-il. Selon un rapport de l'Observatoire europĂ©en des drogues et des toxicomanies, "au cours des derniĂšres dĂ©cennies, le Maroc est devenu le premier producteur et exportateur mondial de rĂ©sine de cannabis, ou haschich". La majeure partie de sa production passe en Europe, par le dĂ©troit de Gibraltar et le reste dĂ©barque sur les cĂŽtes andalouses. En 2013, l'Andalousie a saisi 262 des 319 tonnes de haschich confisquĂ©es en Espagne. Et en 2012, 73,7% des saisies de haschich en Europe avaient Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©es en Espagne, selon le ministĂšre de l'IntĂ©rieur. Jouant au chat et Ă la souris avec les policiers, les trafiquants surveillent les mouvements des patrouilles, s'aventurent sur des voies non navigables, et parfois, font sortir en mer des vedettes "leurres" sans aucune marchandise Ă bord. En Ă©tĂ©, profitant des bonnes conditions maritimes, ils utilisent aussi des scooters des mers, plus difficiles Ă dĂ©tecter. Quitte Ă emmener par la mĂȘme occasion des passagers clandestins. "Une moto peut transporter quatre ballots de cannabis et deux migrants", explique Jesus. "Quand ils arrivent Ă terre, ce sont eux qui se chargent d'emmener la marchandise Ă l'acheteur, pour payer ainsi leur passage". Les plus lus OpinionsLa chronique de Vincent PonsVincent Pons, avec Boris VallĂ©eLa chronique de Marion Van RenterghemPar Marion Van RenterghemLa chronique de Sylvain FortPar Sylvain FortLa chronique du Pr Gilles PialouxPar le Pr Gilles PialouxLedĂ©troit de Gibraltar est situĂ© au sud de l'Espagne, au nord du Maroc, Ă l'est de l'ocĂ©an Atlantique, Ă l'ouest de la MĂ©diterranĂ©e. C'est le seul passage maritime entre l'ocĂ©an Atlantique et la mer MĂ©diterranĂ©e. Il est large de 14,4 km et d'une profondeur d'environ 300m. Le dĂ©troit est considĂ©rĂ© comme faisant partie des eaux internationales. Dans l'AntiquitĂ© ce dĂ©troit Ă©taitSur le dĂ©troit de Gibraltar, quand souffle le levant, ce vent humide venu de l'est, les habituĂ©s savent que les bateaux de migrants sont rares. Trop dangereux. Sur la mer parfois houleuse, les embarcations risquent d'ĂȘtre dĂ©portĂ©es vers l'ocĂ©an Atlantique. Pour prendre le large, les candidats Ă l'exil attendent le retour du ponant, le vent d'ouest, dans l'espoir que les vagues les poussent vers les cĂŽtes espagnoles. Ces derniers mois, les arrivĂ©es de migrants sur le littoral andalou en provenance du Maroc sont Ă la hausse. Depuis le dĂ©but de l'annĂ©e, 27 000 migrants sont entrĂ©s en Espagne par la mer, plus du double qu'en 2017, pendant la mĂȘme pĂ©riode. La PĂ©ninsule est dĂ©sormais leur premiĂšre porte d'entrĂ©e en Europe, devant l'Italie. "Nous avons alertĂ© depuis longtemps les autoritĂ©s espagnoles", rappelle Maria Jesus Vega, du Haut Commissariat aux rĂ©fugiĂ©s de l'ONU HCR. En 2017, dĂ©jĂ , environ 22 000 personnes sont arrivĂ©es ici par voie maritime, contre 8 000 l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente. Les anges gardiens du dĂ©troitDans les locaux de l'association humanitaire Tartessos, au fond d'une cour ombragĂ©e, Ă Cadix, Branly, natif du Congo-Kinshasa, et Abdelkader, un Togolais, racontent leur traversĂ©e, trois jours plus tĂŽt. Tous deux semblent Ă©puisĂ©s. A la tombĂ©e de la nuit, ils sont montĂ©s dans le mĂȘme Zodiac, prĂšs de Tanger. Cap sur Tarifa, pointe Ă l'extrĂȘme sud de l'Europe continentale. Ils Ă©taient 45, entassĂ©s dans un bateau en plastique, dont dix femmes et deux bĂ©bĂ©s. "DĂšs le dĂ©part, la mer Ă©tait agitĂ©e, raconte Abdelkader. Le passeur avait parlĂ© d'une traversĂ©e de cinq heures. Onze heures plus tard, les vagues Ă©taient dĂ©chaĂźnĂ©es, le rivage hors d'atteinte. Nous Ă©tions transis de peur et de froid. Heureusement, l'un d'entre nous avait le numĂ©ro d'une certaine Helena." BasĂ©e Ă Tanger, Helena Maleno, de l'ONG Caminando fronteras, sorte d'ange gardien du dĂ©troit, informe le quartier gĂ©nĂ©ral de Salvamento maritimo, les secours maritimes espagnols, de la prĂ©sence d'embarcations en danger. Des volontaires de la Croix-Rouge apportent une premiĂšre assistance aux migrants recueillis par le Luz de Mar. San Gonzalo Höhr Zamora pour L'ExpressOffre limitĂ©e. 2 mois pour 1⏠sans engagement Pourquoi l'Espagne ? La fermeture des autres routes - celle de la MĂ©diterranĂ©e orientale, via la Turquie et la GrĂšce, aprĂšs l'accord signĂ© en mars 2016 entre l'Union europĂ©enne et Ankara, puis celle de la MĂ©diterranĂ©e centrale par l'Italie - conduit les candidats au dĂ©part Ă essayer une autre voie d'accĂšs. "En Afrique comme au Maroc, les causes de dĂ©part n'ont pas changĂ©, explique Mehdi Lahlou, professeur Ă l'Institut national de statistique et d'Ă©conomie appliquĂ©e, Ă Rabat. Mauvaise gouvernance, corruption, violence. Elles se sont mĂȘme aggravĂ©es." DIAPORAMA >> Les migrants de Gibraltar "Au Maroc, les troubles sociaux dans plusieurs rĂ©gions ont sans doute aussi Ă©loignĂ© une partie des forces de sĂ©curitĂ© de la surveillance des cĂŽtes", diagnostique de son cĂŽtĂ© Ignacio Cembrero, journaliste espagnol spĂ©cialiste du royaume chĂ©rifien. Au siĂšge de la Guardia civil la gendarmerie Ă AlgĂ©siras, des agents surveillent sur leurs Ă©crans les mouvements au large des bateaux. Une multitude de points verts et bleus constellent les Ă©crans du systĂšme intĂ©grĂ© de surveillance extĂ©rieure Sive, des plaisanciers pour la plupart. Quand apparaĂźt un point rouge au parcours inhabituel, il suffit de pointer le curseur sur lui pour que les radars et les camĂ©ras situĂ©es sur les montagnes alentour zooment sur l'embarcation. En cas de besoin, les vedettes de la gendarmerie seront mobilisĂ©es, parfois pour intercepter une patera, un canot de migrants, souvent pour traquer des trafiquants de haschisch. "9 pateras sur 10 quittent le rivage marocain au large de Tanger, Ă l'ouest du dĂ©troit de Gibraltar", moins surveillĂ©, explique le sous-lieutenant Fuentes, l'oeil rivĂ© sur son Ă©cran. De lĂ , ils font appel Ă la sĂ»retĂ© maritime espagnole, autorisĂ©e, selon un accord entre les deux pays, Ă porter assistance dans les eaux marocaines. Ecoutez Catherine GouĂ«set nous raconter son enquĂȘte auprĂšs des migrants en Andalousie sur Soundcloud. Au dĂ©but de l'Ă©tĂ©, lorsque les conditions mĂ©tĂ©o favorables ont entraĂźnĂ© une nette hausse des arrivĂ©es, l'Etat a semblĂ© dĂ©passĂ©. Les communes du littoral ont improvisĂ©, au mieux de leurs moyens AlgĂ©siras, Barbate, Los Barrios, Tarifa ont ouvert des gymnases pour abriter les nouveaux venus. "Sans le moindre ventilateur, la chaleur y Ă©tait Ă©touffante, tĂ©moigne Palma Cadela de Isla, avocate bĂ©nĂ©vole. On informait les migrants sur les dĂ©marches Ă suivre et on les dirigeait vers les associations les plus Ă mĂȘme de leur venir en aide. La plupart des arrivants renoncent Ă demander l'asile pour des raisons politiques ou humanitaires, mĂȘme quand c'est justifiĂ© ils ne peuvent apporter des Ă©lĂ©ments de preuve des persĂ©cutions subies." Avec le systĂšme intĂ©grĂ© de surveillance extĂ©rieure Sive, la Guardia civil garde un oeil sur les mouvements de bateaux en provenance du Gonzalo Höhr Zamora pour L'ExpressAprĂšs quelques semaines de pagaille, les autoritĂ©s ont fermĂ© les gymnases, au dĂ©but du mois d'aoĂ»t, et installĂ© deux centres d'accueil - l'un de 600 places, sur le site d'un ancien chantier naval Ă San Roque, dans la baie d'AlgĂ©siras, l'autre de 700 lits, Ă Chiclana, prĂšs de Cadix, administrĂ© par la Croix-Rouge. Trop peu, trop tard... Faute de place, les migrants sĂ©journent quelques jours dans les centres, guĂšre plus. Et le rĂŽle des ONG reste primordial. "Hier, nous avons Ă©tĂ© sollicitĂ©s pour aller chercher 14 jeunes au centre de Chiclana", raconte Gabriel Delgado, prĂȘtre chargĂ© de la question migratoire au diocĂšse de Cadix et l'un des responsables de Tartessos. "Ils restent ici le temps de souffler, de se retaper", ajoute-t-il. "LĂ -bas, il n'y a pas d'avenir pour les jeunes"Les locaux de l'association peuvent abriter 46 personnes, pas une de plus. Abdusalam, un Comorien ĂągĂ© de 23 ans, a traversĂ© le continent africain dans l'espoir d'une vie meilleure. "Il n'y a pas de travail lĂ -bas. Rien." Depuis quand est-il parti ? "Je ne sais plus. Ma tĂȘte a explosĂ©", confie-t-il, l'air absent. Sa famille s'est cotisĂ©e pour lui permettre de rejoindre son frĂšre Ă Marseille. LĂ , "Inch' Allah !", il trouvera du travail pour venir en aide Ă sa mĂšre et Ă ses quatre soeurs, restĂ©es au pays. Un peu plus loin, Abdelkader Djobo, 37 ans, a fui la dictature du tyran togolais Faure GnassingbĂ©. Il vient du nord du pays, rĂ©putĂ© hostile au clan au pouvoir. "J'ai passĂ© deux ans en prison sans le moindre jugement." EscroquĂ© au Mali par un passeur qui lui faisait miroiter un visa pour les Etats-Unis, il a tout perdu. En Mauritanie, il s'est fait embaucher sur le port de Nouakchott, le temps de gagner de quoi rejoindre le Maroc. Deux ans de travail sur des chantiers Ă Casablanca lui ont permis de rĂ©unir le pĂ©cule nĂ©cessaire Ă la traversĂ©e. "1600 euros, lĂąche-t-il, quoique cela dĂ©pende de la nĂ©gociation... Je n'ai plus un sou. J'ai des amis Ă Pampelune [Navarre], qui travaillent dans les champs. Je vais essayer de les rejoindre." Originaire du nord du Togo, Abdelkader Djobo a fui la rĂ©pression du rĂ©gime de Faure Gonzalo Höhr Zamora pour L'Express"Tous ces malheureux viennent moins parce qu'ils sont attirĂ©s par l'Europe que parce qu'ils fuient leur pays", constate Juan JosĂ© Tellez, Ă©crivain et journaliste de Cadix, spĂ©cialiste des migrations. La majoritĂ© des nouveaux venus proviennent d'Afrique subsaharienne. Moins de 15 % d'entre eux sont originaires du Maroc, parmi ceux arrivĂ©s cette annĂ©e. En vertu d'un accord signĂ© entre Madrid et Rabat, les Marocains interceptĂ©s sans papiers sont renvoyĂ©s sur-le-champ vers leur pays. Faute d'accords semblables, les expulsions vers la majoritĂ© des autres pays d'Afrique sont plus difficiles. "Une fois qu'ils quittent les centres d'accueil provisoire, ils restent sans papiers. Ils n'en sont pas toujours conscients", observe JosĂ© Villahoz, prĂ©sident de l'association Algeciras Acoge "accueil". INTERVIEW >> "Les causes qui poussent les migrants Ă quitter l'Afrique s'aggravent" Les mineurs non accompagnĂ©s font exception. Ils bĂ©nĂ©ficient de la protection de l'Etat. C'est pourquoi les bateaux de clandestins marocains ne transportent quasiment que des adolescents. L'Espagne compte aujourd'hui 8 000 mineurs migrants non accompagnĂ©s, dont 70 % de Marocains. Il y a quelques jours, Susana Diaz, la prĂ©sidente de l'Andalousie, communautĂ© autonome qui en hĂ©berge le tiers, s'est plainte du manque de solidaritĂ© des autres rĂ©gions du pays. La voie Ă©troite de Pedro SanchezA Madrid, depuis le dĂ©but de l'Ă©tĂ©, le gouvernement du socialiste Pedro Sanchez tente de gĂ©rer la crise. Le jeune dirigeant espagnol est arrivĂ© au pouvoir par surprise, le 1er juin, Ă l'issue d'une motion de censure dĂ©posĂ©e contre le gouvernement du Parti populaire de Mariano Rajoy, aprĂšs un mĂ©ga-procĂšs pour corruption. "Cela explique son imprĂ©paration. D'autant que l'immigration ne figurait pas parmi les prioritĂ© de son prĂ©dĂ©cesseur", souligne Elena Sanchez Montijano, spĂ©cialiste des migrations au Centre des affaires internationales de Barcelone Cidob, un institut d'analyse. Le centre Tartessos de l'association Cardijn Ă Cadix offre repos et conseils aux nouveaux arrivĂ©s. Une majoritĂ© d'entre eux sont des Höhr Zamora pour L'ExpressMoins de deux semaines aprĂšs sa prise de fonction, le chef du gouvernement a mĂ©diatisĂ© l'accueil Ă Valence de 630 passagers secourus par l'Aquarius au large de la Libye, aprĂšs le refus de plusieurs autres ports europĂ©ens, pourtant plus proches. Puis, dĂ©but aoĂ»t, Sanchez a donnĂ© son feu vert aux 87 migrants de l'Open Arms, Ă AlgĂ©siras, un port loin d'ĂȘtre le mieux placĂ© pour ce navire Ă©galement en provenance de Libye, ce qui a surpris les ONG comme les Ă©lus locaux. Ensuite, tandis que l'Aquarius Ă©tait une nouvelle fois Ă la recherche d'un port oĂč dĂ©poser 141 migrants supplĂ©mentaires, rescapĂ©s des eaux libyennes, Madrid a convenu avec l'UE d'accueillir 60 d'entre eux. "Pedro Sanchez a pris la question au sĂ©rieux, juge Elena Sanchez Montijano. En tĂ©moigne la crĂ©ation d'un 'commandement opĂ©rationnel unique' des forces de sĂ©curitĂ© espagnoles, et la rencontre avec Angela Merkel dans la rĂ©sidence officielle de Doñana, en Andalousie, en grande partie consacrĂ©e Ă cette question." Au terme de cette rencontre, les 11 et 12 aoĂ»t, les deux dirigeants ont promis de peser sur Bruxelles en faveur d'une aide financiĂšre additionnelle Ă Rabat pour contrĂŽler ses frontiĂšres. CoĂŻncidence ? La semaine passĂ©e, les ONG ont dĂ©noncĂ© des rafles de migrants subsahariens aux abords de Tanger, y compris parmi ceux rĂ©gularisĂ©s ces derniĂšres annĂ©es dans le royaume. Plusieurs centaines d'entre eux auraient Ă©tĂ© dĂ©barquĂ©s en bus Ă Tiznit, Ă 800 kilomĂštres plus au sud. Migrants invisiblesDans les rues d'AlgĂ©siras, de Tarifa ou de Cadix, malgrĂ© la poursuite des arrivĂ©es, les migrants sont Ă peine visibles. La plupart des candidats Ă l'exil ne restent pas en Andalousie, oĂč le taux de chĂŽmage, Ă 23 %, accuse 8 points de plus que la moyenne nationale. DĂšs qu'ils le peuvent, ils se dirigent vers le nord et gagnent les grandes villes espagnoles ou d'autres pays europĂ©ens. A la diffĂ©rence des locaux amĂ©nagĂ©s par les associations, les centres d'accueil de l'Etat et de la Croix-Rouge sont fermĂ©s aux mĂ©dias. Le port de San Roque, oĂč a accostĂ© l'Open Arms, le 9 aoĂ»t, aussi. Une "opacitĂ©" qui agace journalistes et Ă©lus locaux. Le maire d'AlgĂ©siras, JosĂ© Ignacio Landaluce PP, reproche Ă Madrid de ne pas l'avoir consultĂ© lors de l'accueil de l'Open Arms en Andalousie. Il dĂ©nonce aussi la focalisation des mĂ©dias sur les navires des ONG, tandis que ceux des secours maritimes sont passĂ©s sous silence "A AlgĂ©siras, proteste-t-il, on a reçu 30 Aquarius en un mois." L'Espagne compte aujourd'hui 8 000 mineurs migrants non accompagnĂ©s, dont 70 % de Marocains. Gonzalo Höhr Zamora pour L'ExpressA quelques mois d'Ă©lections rĂ©gionales et europĂ©ennes, Pedro Sanchez, Ă la tĂȘte d'un gouvernement minoritaire, sait que sa marge de manoeuvre est Ă©troite. Les ONG lui reprochent de ne pas en faire assez. Mais la vague migratoire estivale a créé une surenchĂšre Ă droite. Il y a une dizaine de jours, le groupuscule d'extrĂȘme droite Vox a organisĂ© un rassemblement au coeur d'AlgĂ©siras, attirant quelque 200 personnes, afin de dĂ©noncer l'"invasion programmĂ©e" du pays. Le successeur de Mariano Rajoy Ă la tĂȘte du Parti populaire, Pablo Casado, au profil plus droitier que l'ancien dirigeant, se veut intransigeant "L'Espagne ne peut absorber les millions d'Africains qui veulent venir en Europe", a-t-il proclamĂ©, le 29 juillet, lors d'un dĂ©bat Ă Avila. De mĂȘme, Albert Rivera, patron du parti libĂ©ral Ciudadanos, critique l'"angĂ©lisme" du chef du gouvernement et dĂ©nonce, Ă l'instar des dirigeants de Vox et du PP, l'"appel d'air" provoquĂ© par l'accueil de l'Aquarius. Les humanitaires, eux, fustigent cette instrumentalisation. "Les politiques parlent d'arrivĂ©es massives et d'invasion, pointe Gabriel Delgado. Utiliser la peur pour en tirer des bĂ©nĂ©fices Ă©lectoraux, c'est immoral." L'Espagne risque-t-elle de subir le syndrome de l'Italie ? En 2015, la gĂ©nĂ©rositĂ© des habitants de l'Ăźle de Lampedusa avait Ă©tĂ© unanimement saluĂ©e. La maire de la principale ville, Giusi Nicolini, avait mĂȘme Ă©tĂ© reçue par le pape François. Las ! Trois ans plus tard, elle a Ă©tĂ© platement battue aux Ă©lections, et l'opinion semble plĂ©bisciter le discours hostile aux migrants du ministre de l'IntĂ©rieur, Matteo Salvini. Pour le moment, les deux situations ne sont pas comparables au total, depuis janvier, quelque 31 000 personnes sont arrivĂ©es par la mer ainsi que par voie terrestre dans les enclaves marocaines de Ceuta et Melilla. L'Italie, elle, avait reçu 120 000 migrants en 2017. Et une moyenne de 168 000, chacune des trois annĂ©es prĂ©cĂ©dentes. Maria Luisa Serrano, de Tarifeños solidarios", collecte et distribue vĂȘtements et produits de premiĂšre nĂ©cessitĂ© aux migrants dans des locaux prĂȘtĂ©s par la mairie de Höhr Zamora pour L'Express La nuit tombe sur Tarifa. Tandis que les amateurs de kitesurf remplissent les terrasses de la vieille ville, Maria Luisa Serrano et Laetitia Goffard, de l'ONG Tarifeños solidarios, prĂ©parent des colis de vĂȘtements dans des locaux prĂȘtĂ©s Ă leur association par la mairie. Entre deux rafales de vent, on perçoit le bruit d'un hĂ©licoptĂšre. "Quand on les entend, on sait qu'un sauvetage est en cours, explique Maria Luisa. Nous avons eu la chance de naĂźtre sur cette rive de la MĂ©diterranĂ©e plutĂŽt qu'en face, ajoute-t-elle, pointant du menton la cĂŽte marocaine, Ă 14 kilomĂštres de lĂ . Quand je vois ces adolescents dĂ©semparĂ©s, je me dis que ça pourrait ĂȘtre mon fils ou mon neveu. S'ils en avaient besoin, je serais heureuse que quelqu'un, quelque part, leur vienne aussi en aide." De notre envoyĂ©e spĂ©ciale, Catherine GouĂ«set. Photos Gonzalo Höhr Zamora pour L'Express Les plus lus OpinionsLa chronique de Vincent PonsVincent Pons, avec Boris VallĂ©eLa chronique de Marion Van RenterghemPar Marion Van RenterghemLa chronique de Sylvain FortPar Sylvain FortLa chronique du Pr Gilles PialouxPar le Pr Gilles Pialoux YfN1S.